FAYL - BILLOT AU COURS DES SIÈCLES
ÉVOLUTION ÉCONOMIQUE

LE SECTEUR SECONDAIRE

NAISSANCE, DÉVELOPPEMENT ET DÉCLIN DES INDUSTRIES LOCALES

L'économie paysanne qui subsista à Fayl-Billot et dans la région jusqu'au 18 ème siècle, reposait essentiellement sur l'agriculture , la forêt et  quelques activités artisanales complémentaires.

Après le passage des grandes calamités qui ruinèrent et dépeuplèrent le village au cours du XVIIème siècle (1), se dessine enfin dans la première moitié du XVIIIème siècle la remontée démographique et avec elle se manifestent les symptômes d'un redressement de l'économie. La création des grandes routes royales dont la voie de Paris à Bâle vers 1730-1740 (R.N.19), la réorganisation des marchés  des foires et l'extension des courants commerciaux qui en résulte, donnent une réelle impulsion aux petites industries locales demeurées jusque-là, à l'état embryonnaire:

- Le tissage du chanvre

- le tournage du bois et la fabrication des sièges paillés

- La vannerie

Ces industries restent toutefois dépendantes du secteur agricole pour leur approvisionnement en matières premières : laine, chanvre, bois, paille et osier.

Le développement du secteur artisanal au cours du XIXèrne siècle donne naissance à une "économie mixte" agricole et industrielle qui, à Fayl-Billot et dans quelques villages voisins, freine l'exode rural engendré par la révolution industrielle et la mécanisation progressive de l'agriculture.

LE TISSAGE

Bref historique.

Le tissage des matières fibreuses d'origine animale et végétale remonte aux âges les plus reculés. De la période néolithique on a retrouvé des tissus qui ont été fabriqués, semble-t-il, par des métiers rudimentaires. A l'âge du bronze d'Europe (800 à 750 avant J.C.) on fabriquait déjà des vêtements de laine. Bien avant l'ère chrétienne, les Lingons produisaient une étoffe assez grossière, la "BOIGE" (2), avec laquelle ils confectionnaient des manteaux à capuchon, les "BARDOCUCULLI" qui étaient envoyés en Italie sous l'occupation romaine (3). Ils connaissaient aussi le chanvre, plante textile originaire d'Asie centrale, introduite en Europe par les migrants asiatiques.

A partir du XVI eme siècle et jusqu'au milieu du XIXème siècle la culture et le tissage du chanvre tiennent une place importante dans l'économie locale. Bon nombre de villageois possèdent une "CHÈNEVIÈRE" petite parcelle de terre affectée à la production de cette plante .

(1) - A peine remis de la guerre de Franche-Comté (1636-1643), le pays est ravagé par deux incendies. En  1668 quatre maisons seulement échappent aux flammes. En 1687 le feu ce déclare au Mont d'Olivotte  et détruit trois cents maisons en une demi-heure.

(2) - BOIGE : selon certains auteurs il pourrait s'agir d'un dérivé de BOIENS, nom d'un peuple de la Gaule Lyonnaise .

(3)- LA HAUTE-MARNE de Paul HEJEAN et de Marcel HENRIOT -1958
     - HISTOIRE DE LANGRES des origines à nos jours. La vie d'une cité.
       Éditeur A JOURNAUX -1984

L'hiver, au cours des longues veillées, on "TEILLE" le chanvre et les femmes le filent au "ROUET" à la lueur d'une lampe a huile posée sur un pied de bois : le "PIOURI". Chaque village a ses tisserands qui pourvoient aux besoins de la population en toiles diverses destinées a la confection de vêtements, de linge de saison, de sacs à grain, d'emballages, de bâches etc. Au Fayl et dans quelques villages des environs, le tissage du chanvre constitue un véritable artisanat. La production bien supérieure aux exigences locales est "levée" en grande partie par des négociants qui en assurent l'écoulement.

Au XVIIlème siècle, l'apparition des premières machines à carder, à peigner et à filer, ensuite l'invention des métiers à tisser mécaniques (JACQUARD vers 1808), favorisent l'essor de l'industrie cotonnière et la création d'usines textiles qui sonnent le glas des "métiers à bras" et des artisans tisserands.

Au XIXème siècle la toile de coton fine et souple se substitue peu à peu à la toile de chanvre plus grossière. L'association du lin et du coton donne des toiles "métisses" résistantes qui trouvent leur emploi en lingerie et dans l'habillement. L'ouverture d'ateliers de confection précipite encore le départ des tisserands et des tailleurs d'habits installés dans les villages.

L'exploitation industrielle des fibres textiles exotiques, SISAL et JUTE, vient concurrencer aussi le chanvre dans la fabrication des ficelles, des cordes, des toiles à sacs et des toiles d'emballage.

LE CHANVRE

Le chanvre commun (CANNABIS SATIVA) est une plante dioïque; fleurs mâles et fleurs femelles sont portées sur des pieds séparés. Le chanvre commun était cultivé autrefois dans toute la France et particulièrement dans notre région pour ses fibres textiles et pour ses graines oléagineuses. C'était la plante textile par excellence. Les "CHÈNEVIÈRES" de Haute-Marne couvraient encore en 1872 une superficie de 1.700 hectares. A cette époque la "FILASSE" recueillie ne servait plus qu'au renouvellement du linge de maison et à l'entretien des sacs à graine Dans la seconde moitié du XIXème siècle cette culture régresse jusqu'à devenir presque nulle au début du XX iéme siècle. Beaucoup de chènevières sont converties en potagers et en vergers.

La culture du lin était peu développée dans notre contrée pour diverses raisons. Cette plante textile (linacée) exige des terres très riches, des fumures copieuses et des soins culturaux soutenus. Avant l'emploi des engrais chimiques le lin ne pouvait revenir sur le même sol que tous les sept ou huit ans.

LA CULTURE DU CHANVRE DANS NOTRE RÉGION

Jusqu'à la fin du XIXème siècle le chanvre est cultivé hors assolement sur des sols humifères suffisamment frais.

Pour des raisons de commodité, apport de fumures, soins culturaux, surveillance de la végétation, les "chènevières" familiales sont implantées près des habitations; leur superficie moyenne est de quelques ares.

Le semis. Au mois de mai, sur un sol bien préparé, on sème les graines à la volée à raison de 3 à 4 hectolitres par hectare. Le semis assez dense permet d'obtenir une "Filasse" plus fine.

La récolte. Les pieds mâles et les pieds femelles ayant végété ensemble sur le même sol, la récolte se fait ordinairement en deux fois. Au mois d'août on arrache les tiges mâles et à la fin de septembre les tiges femelles porteuses des graines; les unes et les autres peuvent atteindre deux mètres de hauteur. Les "JAVELOTTES" (petites bottes de chanvre) sont exposées au soleil pendant quelques jours.

Le battage et le vannage. Les tiges femelles bien sèches sont, battues au tonneau. Les graines recueillies sont ensuite vannées à l'aide d'un van d'osier. Une partie de la récolte de "CHÈNEVIS" est réservée pour les semis. Le surplus donne au pressage une huile généralement de bonne qualité que l'on utilise pour l'éclairage et accessoirement pour la fabrication de peintures et de savons .

 - On attribue l'invention du savon au Gaulois du midi : les MASSALIOTES ou MARSEILLAIS.La fabrication se faisait à partir de suif, d'huiles et de cendres de bois (d'après PLINE l'ancien), par la suite on ajouta de la chaux à la lessive de cendres. Au Moyen'Age se généralisa l'emploi des alcalis purs,soude et potasse.

Les rendements Le chanvre cultivé dans de bonnes conditions fournit par hectare 3 à 4 tonnes de tiges sèches qui peuvent donner 500 à 800 kg de "filasse brute" et 300 à 500 kg de "filasse peignée", selon l'habileté du "peigneur". La récolte de chènevis varie de 10 à 15 hectolitres par hectare. (Poids d'un hectolitre 50 à 53 kg).


Évolution de la culture du chanvre à Fayl-Billot Fin XVIIIème siècle à fin XIXème siècle
                            (données cadastrales et statistiques agricoles)

Année :    1791  1803   1836   1356  1868  1881

Hectares : 8,50    13     13,20    10      10      2

Selon les états de sections dressées en 1791 en vue de l'établissement de la contribution foncière, le nombre de chènevières s'élevait à 150 environ à la fin du XVII1 iéme siècle. Toutes ces chènevières à l'exception de trois, sont mentionnées en section A dite: "Le Village". Les plus petites mesurent ares environ. Beaucoup de parcelles (plus d'une centaine) mesurent entre 3 ares et 9,5 ares (33 perches à 100 perches). Une quinzaine ont une superficie de 12 à 14 ares; trois mesurent une trentaine d'ares. La chènevière de la grange de la Louvière mesure 29 ares et celle de la grange de la Papeterie 60 ares: cette dernière est la plus importante.
        Des agriculteurs haut-marnais s'intéressent à nouveau à la culture du chanvre mais avec des objectifs  différents : production de chènevis (débouchés importants) et production d'une matière première  destinée à la fabrication de papiers.

Le traitement du chanvre

Des tiges du chanvre sont détachées les fibres textiles qui constituent la "FILASSE". L'obtention de la "FILASSE" nécessite trois opérations successives : le "ROUISSAGE", le "TEILLAGE" et le "PEIGNAGE".

- Le "ROUISSAGE". Les bottes de chanvre sont immergées dans l'eau d'un "ROUISSOIR" appelé aussi "ROUTOIR" (2) (en patois NAISOIR ou NAISEU). Cette sorte de fosse assez profonde est alimentée en eau par une source ou un ruisseau. Le chanvre y séjourne environ trois semaines au cours desquelles se produit par fermentation la dissolution des substances gommeuses qui relient les fibres libériennes a la tige. Passé ce temps, le chanvre est sorti du "ROUTOIR", lavé et mis à sécher.
L'osiériculteur-vannier a emprunté au vocabulaire de l'industrie du chanvre le mot "ROUTOIR" pour désigner la fosse, peu profonde, dans laquelle il range debout les bottes d'osier vert qui seront écorcées au printemps après le réveil de la sève. Les "ROUES" : endroit où l'on faisait "ROUIR" le chanvre.

Au XIXème siècle, le "ROUISSAGE" du chanvre est considéré comme un facteur de pollution, aussi est-il soumis à une réglementation sévère, (formation d'eaux putrides avec dégagement d'odeurs nauséabondes). Voir pages suivantes l'arrêté municipal de 1823 et le règlement de police de 1862.

- Le TEILLAGE ou TILLAGE. Ce travail consiste à détacher les fibres textiles des tiges. Pour faciliter l'opération on met sécher le chanvre à proximité d'une cheminée ou on le soumet a une température douce dans un four à pain. Ces procédés jugés très dangereux (risque d'incendie) sont strictement interdits au XIXème siècle, (voir le règlement de police). Les tiges sont ensuite broyées à l'aide d'un maillet de bois ou d'une "BROIE" appelée "MAQUE" ou "BRAQUE". Cet instrument de bois est constitué par un bâti supportant deux branches cannelées et articulées qui agissent comme deux mâchoires. Le "TEILLAGE" se fait aussi sans instrument en arrachant les fibres textiles à la main après avoir brisé les tiges. Dans certains villages de Franche-Comté il existe des "RIBES". La "RIBE" ou moulin à "TEILLE" est constituée par une meule de pierre qui exécute dans la position verticale un mouvement giratoire sur une plate-forme circulaire de bois dur. (Musée de Champlitte).

Les poignées de "filasse brute" sont liées à la partie la plus grosse (pied); elles sont pendues dans une grange ou dans un grenier.
Les "CHENEVOTTE", tiges dépouillées de la filasse, sont mises en petits paquets. Ces "MARGOTINS" servent d'allume-feu.

- Le PEIGNAGE. Ce travail trés pénible et malsain (poussière abondante) est généralement confié à des professionnels. Les "PEIGNEURS DE CHANVRE" vont de village en village et opèrent dans les granges et les chambres à four . Dans un premier temps le peigneur frotte la filasse sur un "fer" fixé à une poutre verticale; un mouvement de va-et-vient énergique et répété provoque le détachement des brins d'étoupe les plus grossiers. Dans un deuxième temps la filasse est passée dans plusieurs peignes métalliques : d'abord dans un peigne à dégrossir ensuite dans un peigne moyen, puis pour terminer dans un peigne fin.

Trois qualités de fibres sont obtenues :

- Une "ETOUPE" de peu de valeur provenant des déchets.

- Des fibres de deuxième choix plus ou moins grossières.

- Des fibres de" premier choix, longues, fines, souples et régulières qui formeront le fil destiné au tissage des toiles légères de bonne qualité. La filasse "peignée" est liée en petits paquets qui sont repliés en deux. Au Fayl ces paquets sont baptisés les "Fillettes".

Le FILAGE du chanvre et de la laine.

Pendant des siècles le filage manuel constitue dans notre région une activité essentiellement féminine. Les femmes filent surtout l'hiver à la veillée II existe cependant quelques fileuses professionnelles et certaines acquièrent par leur habileté et la qualité de leur travail une renommée qui dépasse parfois les limites de leur village.

Deux procédés de filage sont couramment utilisés :
- Le filage au "FUSEAU".
- Le filage au "ROUET".

- Le filage au fuseau. Ce procédé remonte à la plus haute Antiquité. Au XIXème siècle il est encore bien connu des bergères et des vachères.. Tout en surveillant son troupeau, la bergère file la laine. Elle étire régulièrement de la quenouille affermie nous un bras ou sous les tresses de son tablier, une pincée de fibres qu'elle tord pour former une mèche,, Avec sa main droite elle imprime au fuseau un mouvement de rotation en roulant l'extrémité supérieure de la "COCHE" entre le pouce et l'index. La rotation provoque la torsion de la mèche et le poids du fuseau son étirement jusqu'à l'obtention d'un fil mince et relativement régulier. De temps en temps la fileuse redonne de l'élan au fuseau; quand le fil a atteint une longueur de 50 à 70 cm. elle l'enroule sur le fuseau qui fait office de bobine.

- Le filage au rouet. Le "rouet" inventé au début du XVIème siècle permet de filer sans interruption de grandes longueurs de fils.

La laine est d'abord débarrassée de ses impuretés, pour la rendre plus vaporeuse on "l'écharpe" manuellement. La fileuse ne se sert pas toujours d'une quenouille, bien souvent elle dépose la touffe de laine dans son tablier.

Pour le filage du chanvre, l'ouvrière utilise une grande quenouille fixée verticalement à un pied de bois. Avec ses mains elle réunit les fibres de chanvre et forme une mèche qui est entraînée par la "BROCHE A AILETTES" dans un mouvement rapide de torsion; le fil obtenu est enroulé simultanément sur la bobine située entre les deux ailettes de la broche .

Afin de faciliter le glissement et la liaison des fibres de chanvre et aussi pour atténuer leur rugosité, la fileuse doit mouiller régulièrement ses doigts. Elle dispose à cet effet d'un petit récipient d'eau adapté au rouet : "LE MOUILLE DOIGTS".

Selon la qualité des fibres, leur finesse et le doigté de l'ouvrière on obtient des fils de grosseurs différentes qui sont mis en écheveaux sur des "DEVIDOIRS".

Les fils les plus grossiers serviront à faire des toiles d'emballage, des toiles à sacs, des cordages etc. Les fils moyens donneront les toiles résistantes qui entreront dans la fabrication de bâches et de voiler (après recordage), de toiles à matelas et de certains vêtements pantalons, jupes, tabliers, guêtres, camisoles, caracos, sarraus ou blouses (en patois BIAUDES)Les fils fins deviendront des toiles légères destinées à la confection des coiffes , du linge de corps et du linge de maison: chemises, caleçons, draps, serviettes, nappes, mouchoirs etc.

LE TISSAGE.

La laine et le chanvre, accessoirement le lin et le coton (XIX à siècle) sont tissés dans nos villages sur des métiers à bras dont l'invention remonte à des temps très lointains.

Le tissage consiste à entrelacer les fils textiles pour obtenir des panneaux souples et résistants appelés "Tissus". Cet assemblage est composé de fils de "CHAINE" qui sont disposes dans le sens de la longueur du tissu, et de fils de "TRAME" (ancienne dénomination TREME) passés au travers des fils de "CHAINE" dans le sens de la largeur. La "DUITE" représente la longueur du fil de "TRAME" d'une lisière à l'autre.

Trois sortes de tissus à armure simple sont fabriqués dans notre région:

- La TOILE : tissu de chanvre ou de coton (XIX ieme siècle).

- Le DRAP : étoffe de laine.

- Le DROGUET : tissu mixte "tramé" de fil sur "chaîne" de laine (du XVI ieme siècle au XVIIIéme siècle) ou "tramé" de laine sur "chaîne" de coton ou de fil (XIXèmc siècle). Le DROGUET est considéré comme un tissu de qualité médiocre.(1)

Le tissage représente un ensemble d'opérations assez compliquées que l'on peut résumer ainsi :

1 - L'OURDISSAGE (2) ou montage des fils de "chaîne" sur le métier,
soit horizontalement (basse-lisse) soit verticalement (haute-lisse)

2 -L'ENCOLLAGE des fils de "chaîne" avec un enduit spécial destiné à augmenter leur résistance au frottement de la "NAVETTE".

3 - Le RENTRAGE ou passage des fils de "chaîne" dans les maillons des "LISSES".

4 - Le CANETAGE ou enroulement des fils de "trame" sur les petites bobines qui sont introduites dans les "NAVETTES".

5 - Le TISSAGE proprement dit qui consiste à passer les fils de "trame" dans les fils de "chaîne" à l'aide d'une "NAVETTE"; les "LISSES" actionnées par des pédales permettent par leur mouvement ascendant et descendant, l'alternance des passage.

6 - Le TAQUAGE (3) opération qui a pour but de serrer la "DUITE" sur la partie tissée à l'aide du "PEIGNE" mu par un "BATTANT" appelé "TAQUE".

(1)- DROGUET : mot dérivé de "DROGUE" qui désignait autrefois une chose de mauvaise qualité.

(2) et (3) OURDISSAGE et TAQUAGE : termes techniques repris par les vanniers de la région et s'appliquant respectivement :
-à un mode de fixation des "montants sur un fond de panier(ourdissage)
-à un tressage serré d'osier ou de rotin. La "TAQURE" est un travail de vannerie "en plein".

Rendement. Dans une journée de travail (12 à 14 heures) un tisserand peut produire 4 à 6 "AUNES" (1) de tissu selon sa largeur, la grosseur des fils et la qualité recherchée.
(Référence : dictionnaire encyclopédique Larousse de la fin du XIXème siècle.)

LES FINITIONS

Les tissus écrus sont éventuellement blanchis ou teints et parfois "apprêtés" quand ils sont destinés au "NEGOCE".

Le blanchiment. Anciennes méthodes.

Le blanchiment sur pré. Les toiles de lin, de chanvre et de coton sont étendues sur un pré dont l'herbe est suffisamment haute pour permettre la circulation de l'air et la pénétration de la lumière sous elles; elles sont arrosées régulièrement. L'opération dure ordinairement deux à trois semaines par beau temps, mais beaucoup plus longtemps - voire deux ou trois mois selon la température de l'air et la fréquence de l'ensoleillement - si l'on veut obtenir un blanchiment parfait. Le blanchiment naturel est obtenu par l'action combinée de l'oxygène de l'air, de l'eau, de la chaleur et des rayons solaires. Des lessivages bouillants permettent de l'activer.

Le blanchiment par lessivage. Avant d'être teintes les toiles sont lessivées à la soude ou à la potasse. Un procédé simple et économique consiste à mettre des cendres de bois sur une toile tendue à l'orifice du "CUVIER" contenant les toiles; on verse sur les cendres de l'eau bouillante et on clarifie avec un peu de chaux. Les cendres les plus riches en potasse sont celles qui proviennent de la combustion du chêne, du frêne, du charme et des fruitiers.

Le blanchiment des étoffes de laine. Le "drap" et le "droguet" sont d'abord soumis à un lessivage et à un dégraissage (élimination du SUINT par des solutions aqueuses de soude ou de potasse). Ce travail est confié, à un spécialiste: le "FOULON". Les tissus sont enduits d'argile (2) et immergés dans une auge contenant des eaux alcalines. Ils sont remués en tous sens et foulés avec des pilons ou des maillets de bois mus par un mécanisme hydraulique appelé le "MOULIN à FOULON". Sortis du bain les tissus sont lavés et rincés à l'eau courante, puis séchés.

La teinture des textiles.

La connaissance de cet art date de la plus haute Antiquité. Le principe se résume à fixer, d'une manière durable, un colorant sur les fibres textiles. Dans certains cas assez rares, les matières colorantes se fixent naturellement sur les fibres traitées par affinité physique ou chimique. La plupart du temps on a recours à des substances intermédiaires appelées "MORDANTS" qui assurent la pénétration du colorant et sa résistance aux lavages.

Dans les campagnes les tissus sont employés le plus souvent à l'état naturel; les toiles écrues sont simplement blanchies et les lainages demeurent blanc, brun ou noir selon la couleur originelle de la laine.

Les teinturiers des villages procèdent souvent empiriquement. Ils appliquent des recettes dues au hasard et à la routine et fabriquent des mixtures à base de matières végétales et de sels minéraux additionnés parfois d'urine .

Les teinturiers des villes ont recours à des techniques plus élaborées. Les procédés diffèrent selon la nature des fibres (laine, chanvre, lin, coton) et l'état des produits à traiter (flocons, fibres non filées, écheveaux de fil, tissus etc.).

Les textiles préalablement lavés sont immergés dans des bains de teinture et de mordant - souvent combinés - préparés dans des chaudières de cuivre ou de fonte; le bain chaud est transvasé parfois dans un "CUVIER" de bois.

(1) - AUNE ; ancienne unité de mesure de longueur utilisée pour les tissus.

      L'AUNE de Paris valait 3 pieds 7 pouces et 8 lignes soit en mètre: 1,188. L'AUNE du tisserand valait        30 pouces soit : 0,812 mètre.

(2) - La TERRE A FOULON est une argile qui provient de la décomposition de schistes et qui a la                    propriété d'absorber les acides gras et les huiles en l'occurrence le SUINT.

Avant d'être plongés dans la teinture, les flocons de laine et de coton, le chanvre et le lin en filasse sont déposés dans des paniers tandis que les écheveaux de fils sont suspendus à des bâtons. Les tissus sont mis sur une claie qui les isole du fond de la chaudière ou du cuvier; ils sont remués à l'aide de longs bâtons. Au sortir du bain les écheveaux et les tissus sont tordus, égouttés, rincés plusieurs fois à l'eau claire afin d'être débarrassés des grumeaux et de l'excès de teinture. Ils sont sèchés à l'air et à l'ombre ou dans un local chauffé. Les écheveaux sont suspendus à des perches disposées horizontalement et les tissus sont étendus sur des cadres.

Les matières tinctoriales.

Des mordants. Ils sont choisis parmi les acétates d'aluminium, de cuivre etc. L'ALUN (sulfate double de potassium et d'aluminium) est souvent employé ainsi que certaines matières fixatrices dont le TANIN provenant de l'écorce de chêne et de châtaignier et le TARTRE, dépôt formé par le vin.

Les matières colorantes. La plupart des colorants sont d'origine végétale.

- La racine de la GARANCE, l'ORSEILLE de terre (lichen) et le BOIS DE CAMPÊCHE donnent des colorants rouges.

- Les feuilles de 1'INDIGOTIER et celles du PASTEL donnent les colorants bleus.

- Les tiges de la GAUDE et le bois du FUSTET (variété de SUMAC) fournissent les colorants jaunes.

- Le BROU de NOIX (enveloppe verte de la noix) et la SUIE donnent les colorants bruns.

- Le NOIR est obtenu par mélange de sels de fer avec des matières contenant du TANIN ou de l'acide GALLIQUE (noix de galle).

Les apprêts.

Ils sont différents selon la nature des tissus, leur mode de fabrication et la présentation que l'on désire obtenir. Citons les principaux :

- Le FOULONNAGE dont nous venons de parler qui s'applique surtout aux tissus de laine. Il permet de resserrer les fibres et de donner aux étoffes un aspect feutré.

- Le TONDAGE qui consiste à éplucher les surfaces des tissus et à les rendre plus lisses.

- L'HUMECTAGE et 1'ETIRAGE qui a pour but d'étendre les tissus en tous sens pour les défroisser.

- L'ENCOLLAGE et le GLAÇAGE qui sont réalisés soit avec des gommes, soit avec des "EMPOIS"(gelées d'amidon). Ils affermissent et lustrent les toiles.

- L'IMPERMEABILISATION (bâches) qui est obtenue par l'imprégnation d'huiles siccatives dans le tissu. On emploie de l'huile de lin ou de chanvre que l'on rend plus siccative par adjonction de LITHARGE (oxyde de plomb).
(Encyclopédie Louis FIGUIER - Les MERVEILLES DE L'INDUSTRIE - 1880)

LES TISSERANDS

De nos jours on dénomme "TISSERAND" tout fabricant de tissus travaillant soit sur un "métier à bras" (artisan), soit sur un "métier mécanique" dans une usine de tissage.

Jadis les "TISSIERS" étaient classés selon leur spécialité et portaient des noms différents. On trouvait dans notre région :

- Les "BORGIERS" qui fabriquaient la "BOIGE" tissu de laine feutré d'origine lingonne encore employé au Moyen Age. (1)

(1)- Histoire de Langres et de ses institutions municipales jusqu'au commencement du XVIème siècle -              Ferdinand CLAUSON - 1954.

- Les "DRAPIERS" fabricants de "DRAP" (l), autre tissu de laine feutré et serré par le foulage, généralement de bonne qualité, (on donnait également le nom de "DRAPIER" au marchand de "DRAP".

- Les "TISSIERS" ou "TEXIERS" (2) qui fabriquaient les toiles de chanvre et de lin, et celles de coton au XIXème siècle. La dénomination "TISSERAND" leur est donnée à partir du XVII ème siècle. (XIXème siècle au Fayl).

- Les "DROGUETIERS" spécialisés dans le fabrication du "DROGUET".

On trouvait aussi quelques "BONNETIERS" et des "FAISEURS DE BAS" sur métier.

Dans certaines régions de France œuvraient les "grands maîtres" du tissage :

- Les "SOYEUX", fabricants de SOIERIES.

- Les "GAZIERS" fabricants de "GAZE", tissu très léger de soie, de lin ou de laine, originaire de GAZA ville de Palestine.

- Les "TISSUTIERS" et les "PASSEMENTIERS" spécialisés dans la production des "PASSEMENTS", des "GALONS", des "GANSES" des "RUBANS" etc.

- Les "FERANDINIERS", fabricants de "FERANDINE", tissu de soie et de laine employé pour la confection de vêtements légers d'été (3).

Pendant des siècles, les tisserands de nos campagnes représentent un des nombreux maillons de la chaîne de production et de transformation de la laine, du chanvre et du lin. Cette chaîne prend naissance chez le paysan producteur de la matière première; elle passe par le peigneur de chanvre et le cardeur de laine, la fileuse, le tisserand, le foulon, le blanchisseur et le teinturier, le tailleur d'habits, la couturière et la lingère, la dentellière et la brodeuse. Tout ce monde laborieux est détenteur d'un savoir acquis de génération en génération et affine par la pratique et l'ingéniosité.

La vie professionnelle commence vers l'âge de 18 ans après un temps d'apprentissage de 3 ou 4 ans; elle se poursuit, sauf accident ou décès prématuré, jusqu'à un âge avancé, 70 ans et plus parfois.

Le tisserand exerce son métier dans le cadre familial. Il travaille 12 à 14 heures par jour. Son épouse et ses enfants l'aident dans ses travaux .Il transmet ses connaissances a ses fils; ceux-ci essaiment, aprés avoir pris femme et fondent de nouveaux foyers. Très souvent le mari de la benjamine de la famille embrasse le métier de son beau-père. Le jeune couple cohabite alors avec les parents et devient, avec la fuite du temps, leur bâton de vieillesse. C'est ainsi que de nouveaux patronymes apparaissent dans la communauté des tisserands.

La grande difficulté pour devenir artisan réside dans l'acquisition d'un métier à tisser. Heureux celui qui a la chance d'hériter de l'outil d'un aïeul Le plus souvent le jeune tisserand doit s'endetter pendant des années pour avoir son métier. Quelques "tisserands-paysans" ne travaillent sur leur métier que l'hiver; à la belle saison ils s'adonnent aux travaux agricoles.

Presque tous les tisserands sont propriétaires d'une maison et d'un jardin, mais rares sont ceux qui possèdent une chènevière.
Les alliance entre familles d'artisans de même rang sont fréquentes:
tisserands, tourneurs "en" bois et vanniers. Chaque corps de métier est hiérarchisé; dans le textile les "soyeux", les "drapiers" et les "passementiers" tiennent le haut du pavé. Les "Maîtres" ont le privilège de former des apprentis et d'employer des "compagnons". Les contrats d'apprentissage assez rares la campagne sont dressés par des notaires. (Il serait intéressant de retrouver une de ces conventions pour en connaître les termes).

(1) - Le mot "DRAP" en bas latin DRAPPUS serait d'origine gauloise.

(2) - Au Moyen Age, le TISSIER est dénommé "TEXTOR" mot latin issu de TEXTUR (tissu) et de                EXTERE (tisser).

(3) - DICTIONNAIRE FRANÇAIS par P. RICHELET - Edité à GENEVE - 1680 -

(4) - Dès l'âge de 8 à 10 ans les enfants doivent participer aux travaux familiaux à la maison et au-dehors.          Privilégiés sont ceux que l'on met en apprentissage à l'âge de 13 ou 14 ans pour avoir plus tard "un            bon métier dans les mains".

(5) - De 1669 à 1891 on relève 160 noms patronymiques dans la communauté des tisserands.

·  Parmi les métiers, certains sont plus recherchés que d'autres et leurs membres jouissent de la considération générale. Il en est ainsi pour les "maréchaux-ferrants" (les magiciens du fer et du feu), les charrons, les bourreliers selliers, les tailleurs de pierre, les charpentiers, les tailleurs d'habits, les cordonniers (métier très en vogue au XVIIIème siècle), les couteliers, les perruquiers, les boulangers...

Il est peu probable qu'une corporation de tisserands ait existé au Fayl en tant qu'organisation professionnelle légale ayant le pouvoir de réglementer l'exercice de la profession et d'en limiter l'accès en particulier lors des périodes de récession économique. On peut supposer que les artisans tisserands exerçaient librement leur métier dans les villages et que la qualité de leur production et sa juste rémunération étaient soumises à l'appréciation de clientèle particulière et à celle plus "sévère" des marchands tixiers.

 LE MONDE DU TEXTILE A FAYL - BILLOT
De la seconde moitié du XVIIème siècle (période postérieure à la guerre de Franche-Comté.) à la fin du XIXème siècle.

Une consultation méthodique des registres paroissiaux du XVIIème et du XVIIIème siècles nous a permis de faire le recensement des métiers exercés au Fayl à cette époque et de dénombrer approximativement les tisserands, les tourneurs sur bois et les vanniers qui représentaient la "main d'œuvre industrielle" la plus importante du village.

  Les gens du textile de 1669 à 1805.

 

 

Périodes

1669-1701

1701-1730

1731-1760

1761-1790

1804-1805

Nombre de tisserands dénombrés

 45

 30 à 40

 40 à 50

 60 à 70

 50 à 60

Drapiers

2

4

4

5

0

Droguetiers

 

 

2

1

3

Peigneurs de chanvre

?

?

5

9

4

Fileurs et fileuses de laine

 

 

 

4

1

Blanchisseur de toile

 

 

 

1

 

Teinturiers

?

3

2

5

6

Cordiers

?

4

5

4

2

Marchands "Texiers"

 

 

2

2

?

Fabricant de bas sur métier

 

 

 

 

1

Les professions ne sont mentionnées sur les registres paroissiaux (actes de baptêmes, de mariages et de décès) qu'à partir de 1660/1665 et de façon très irrégulière jusqu'au milieu du XVIIIème siècle. L'évaluation du nombre de tisserands en activité au cours des quatre période comprise entre 1669 et 1790 est donc très approximative.

Au XVIIIème siècle, la population du Fayl oscillait entre 2.000 et 2.300 âmes.

 

 A partir de 1836, les registres communaux de recensement de la population nous donnent des chiffres "officiels" qui dénoncent le déclin du tissage artisanal au Fayl.

 

 

1836

1846

1851

1856

1861

1866

1872

1876

1886

1891

1901

Tisserands

22

21

25

18

15

13

9

5

2

2

0

Droguetiers

1

1

1

 

 

 

 

 

 

 

 

Peigneur de chanvre

1

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Teinturiers

1

2

1

3

1

2

1

1

1

1

0

Cordiers

2

2

1

1

1

?

1

1

?

3

2

Nota : Les tisserands étaient établis dans tout le village. En 1891 il n'en restait plus que deux: BASILISKI François âgé de 77 ans, demeurant ruelle des Patiniers (l) et NICOLAS François âgé de 68 ans demeurant rue du Pavillon.
(1) - BASILICKY François, né au Fayl en l8l4, était le fils de Jean BASILICKY immigré                           polonais et de Anne MIDY.


Quelques familles du Fayl donnèrent plusieurs générations de tisserands, recensées sur les registres paroissiaux:

1669:    LASNIER        1702:    GARNIER         1724:    TANIERE          1759:    VOISEY
1678:    VAUGIEN       1706:    RENARD          1728:     ROMAND         1759:    VAUVILLIER
1678:    MONGIN        1715:    FRANCARD      1736:    BEAUREPERE  1768:    DROUOT
1695:    NICOLAS       1719:    CARTERET       1736:    MAUPIN     
1699:    PRIE              1719:   VOILLERAUD     1751:    DENIS


Commercialisation matières premières et des produits fabriqués

La laine et le chanvre Les producteurs prévoyants mettent d'abord de coté la laine et la filasse destinées a couvrir les besoins de la famille. Ils vendent le surplus à des marchands ou s'en servent comme monnaie d'échange .L'argent est rare et dans les villages on vit encore en économie de troc. Le travail du tisserand est souvent rémunéré en nature.

Le chènevis est porté chez l'huilier qui fournira l'huile pour l'éclairage et pour divers usages après avoir opéré un prélèvement sur la graine pour prix de son travail.

Les tissus. Le perfectionnement des techniques de navigation et l'amélioration de la construction navale favorisent, à partir du XVIème siècle, l'ouverture de grandes routes maritimes et la création de nombreux comptoirs sur tous les continents. Il s'en suit une intensification des courants commerciaux ce qui explique les besoins importants en toiles diverses. Fendant trois siècles, on fabrique au Fayl de grandes quantités de toiles d'emballage, de toiles à "FONCER" (2) et de toiles à grain et à sel. Cette activité artisanale amorce son déclin en 1846 lors de la première crise industrielle du XIXème siècle.

            (2) - FONCER : garnir d'une toile grossière le fond d'un récipient.

La toile est "levée" par les marchands, transportée jusqu'à Gray et dirigée par voie fluviale sur le midi de la France. Les toiles fortes (fil retordu) servent à fabriquer des voiles de bateaux et les toiles plus grossières sont employées pour le transport des marchandises. Les étoffes de laine et les toiles fines dont on fait des vêtements et du linge de maison sont enroulées sur des planchettes de bois et négociées à la "pièce"; la "pièce" de tissu a une longueur déterminée. Ces tissus sont cédés généralement à des "marchands roulants" (on dit aussi rouliers) qui parcourent avec leur chariot les provinces voisines. Nombreux sont ceux qui visitent la Bourgogne et la Franche-Comté: certains descendent jusqu'à Lyon et empruntent parfois le couloir rhodanien pour atteindre les villes du midi. Ils écoulent leurs marchandises, toiles, cordages, objets de bois tournas, chaises et vanneries, aux foires et aux marchés des villes. Ils se réapprovisionnent en marchandises diverses  (soierie, passementerie, mercerie, épicerie etc.) qu'ils revendent en partie sur le chemin du retour.

Ces voyages durent plusieurs semaines et souvent plusieurs mois; ils ne sont pas sans péril, brigands, détrousseurs et autres malfaiteurs des grands chemins hantent les foires et les auberges, guettant les bonnes occasions, dressant sur les routes des guets-apens aux voyageurs et aux marchands. Il y a aussi les risques d'accidents et les maladies provoquées par les intempéries et la fatigue.
Généralement, le marchand donne au tisserand un acompte à valoir sur le montant de la somme due et lui verse le solde de retour au pays.

Quelques prix de marchandises.

Filasse de chanvre brute, le quintal : 85 F. en 1868

Filasse peignée, le quintal : 120 F. en 1856 et 200 F. en 1881

Chènevis, l'hectolitre : 20 F. en 1856; 12 F. en 1868; 20 F. en 1881

Huile de chènevis, l'hectolitre : 100 F. en 1881

Toile de chanvre, l'aune (0,182 m.) 0,65 F. en 1773


Réglementation relative au traitement du chanvre

Arrété du maire en date du 26 mai 1823.

"Le Maire de la commune du Fayl-Billot, vu les lois et règlements relatifs au rouissage du chanvre, a arrêté ce qui suit :

Au vu de la délibération du Conseil Municipal du 10 mai dernier, la distance nécessaire pour faire rouir du chanvre dans des mares ou creux, est fixée à douze cents mètres des habitations formant la commune et à quatre cents mètres environ des habitations hors la commune.

Le présent sera lu et publié dans toutes les places de la commune afin que personne n'en ignore, il en sera délivre une copie Mr le Juge de Paix, une Mr l'Adjoint et une aux gardes champêtres qui veilleront à ce que le présent soit mis a exécution et rédigeront des rapports contre tous les contrevenants"
Signé : BACQUET.

Règlement de police de 1362

Incendies :                                                                                                                                                                        Art 93: Il est défendu de faire sécher le chanvre dans les fours ou près des cheminées.

Routoirs :
Art. 243 : II est fait défendu de faire rouir du chanvre dans les ruisseaux, fontaines, lavoirs, mares ou tous autres endroits, à une distance moindre de trois cents mètres des habitations.

 

Un siècle s'est écoulé depuis que les derniers tisserands du Fayl ont cessé leur activité. On n'entend plus dans les rues et les ruelles du village le claquement sec et rythmé de la "taque", ni le susurrement du rouet dans les demeures. Ces bruits familiers aux oreilles de nombreuses générations de Fayl-Billotins se sont éteints avec l'abandon des chènevières.

Métiers à tisser, fuseaux, rouets et autres outils appartiennent au passée Pour les jeunes générations tournées vers les techniques modernes et le machinisme, ils sont des objets de curiosité, les témoins passifs de temps révolus et de gestes oubliés que quelques rares initiés essaient de faire revivre.

      A                                                               C                                                        B                                                                                                    

 

 

 


La fabrication d'une corde nécessite le concours de 3 ouvriers places en A, B et C
.

1ère phase : Les ficelles sont tendues du crochet "0" (adapté au chantier mobile A) aux 4 crochets "1, 2, 3 et 4" adaptés au chantier fixe B.

2eme phase : Les 4 "TORONS" sont formée simultanément en actionnant manuellement l'excentrique adapte au chantier fixe B.

3eme phase : 4 "TORONS" sont ensuite cordés ensemble en tournant le crochet "0" à l'aide de sa manivelle et en synchronisant cette rotation et le mouvement de l'excentrique, (opération appelée "COMMETTAGE").

Le "COCHOIR" appelé aussi "TOUPIN" est maintenu fermement par le Maître cordier qui règle la torsion tout en se déplaçant du chantier A vers le chantier B. Le cordage est plus ou moins serré selon que l'on veut obtenir une corde raide ou une corde souple.


BIBLIOGRAPHIE.
Ouvrages conseillés

UN HOMME ET SON TERROIR. Evocation de la vie rurale d'autrefois.
Albert DEMARD et Jean-Christophe DEMARD. Editeur Joël GUENOT - 1978

-LA SAGA DU HAUT-GUE. Mémoire populaire d'un terroir français.

 Jean-Christophe DEMARD. Illustration de René NUFFER - Editions ERTI - 1987

A visiter : MUSEE DEPARTEMENTAL Albert DEMARD à CHAMPLITTE

Nous remercions Madame Jeanne LEMOINE épouse Michel PERNOT et Monsieur Robert BALLY qui nous ont transmis aimablement leurs connaissances sur le filage au fuseau et au rouet.

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